VILLERS-AUX-VENTS.
Villers-aux-Vents, anciennement Villers-aux-Vans, Vilare ad Vannos ou
ad Ventos, village de l’ancienne province du Barrois, fait partie de la
perception de Laheycourt.
Son territoire est limité, au nord, par ceux de Laheycourt et
d’Auzécourt ; à l’est, par ceux de Louppy-le-Grand et de Laimont ; au sud, par
ceux de Laimont et de Brabant, et, à l’ouest, par les territoires de Brabant et
d’Auzécourt.
Cette localité est situé sur la hauteur qui domine la vallée où coule
le ruisseau de Nausonce, dans une position assez pittoresque, et à 1200 mètres,
sur la droite, de la route des Romains, qui va de Bar à Reims.
Le ruisseau de Nausonce, qui prend sa source sur le territoire de
Génicourt, canton de Vavincourt, passe dans la vallée au bas du village ; il
coule de l’est à l’ouest, et arrose, lors des grandes eaux seulement, les
prairies dites Sous-le-Bois-la-Ville, les Cugnès, le Breuil, le Champ-Lohée,
Au-delà-de-l’Eau, Sous-le-Poré et Nalivat, et va se jeter dans la Chée, entre
Brabant et Vroil (Marne). On pêche, dans ce ruisseau, quelques vilains, des
goujons, des baveux, des loches et des écrevisses.
La fontaine de Saint-Louvent, patron de Villers-aux-Vents, se trouve à
360 mètres au nord du village, dans la contrée de ce nom : ses eaux vont se
rendre dans le fossé de Toulmont. Le bassin est décoré de la statue du saint et
d’un tronc destiné à recevoir les offrandes des pèlerins qui viennent boire
l’eau de cette fontaine, laquelle a, dit-on, la propriété de préserver de la
fièvre.
On remarquera aussi, sur le territoire, les fossés de Plunget et de
Toulmont, dans les contrées de ce nom, mais qui ne donnent de l’eau que lors de
la fonte de neige et des grandes pluies ; leurs eaux vont tomber dans le
ruisseau de Nausonce, au pont de Piroye.
Il existe un pont de bois, à l’usage des voitures et des piétons, sur
le ruisseau de Nausonce, au bas du village, pour le passage du chemin qui
conduit à Bar-le-Duc, et un autre pont de pierres, au-dessous du moulin de
Piroge, pour le passage de la grande route de Bar à Reims.
Le sol, de nature calcaire, siliceuse et argileuse, est entièrement
découvert et accidenté ; les coteaux, d’une médiocre élévation, sont
accessibles et cultivés sur tous les points.
Les travaux relatifs à l’opération du cadastre ont été terminés en
1826. La nature et la contenance des propriétés se divisent ainsi qu’ils suit,
d’après la matrice cadastrale :
|
h. |
a. |
c. |
|
|
h. |
a. |
c. |
Terres labourables |
403 |
92 |
00 |
|
Bois plantés |
0 |
84 |
70 |
Près fauchables |
101 |
07 |
54 |
|
Terrains plantés |
3 |
68 |
35 |
Vignes |
40 |
68 |
10 |
|
Routoirs |
0 |
43 |
32 |
Chenevières |
8 |
18 |
93 |
|
Canal de moulin |
0 |
13 |
30 |
Jardins |
1 |
51 |
31 |
|
Friches |
0 |
40 |
50 |
Vergers |
4 |
48 |
63 |
|
Superficie des bâtiments |
2 |
86 |
83 |
Etangs |
31 |
79 |
80 |
|
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|
L’agriculture a fait de très grands progrès dans cette localité depuis
un demi-siècle. Les propriétés, plus disséminées qu’autrefois, sont cultivées
avec plus de soin, et chacun a profité, avec empressement, de toutes les
améliorations nouvelles ; celles qui se surtout remarquer consistent dans la
culture des pommes de terre et des prairies artificielles en trèfle et luzerne.
Le territoire a été aussi amélioré, depuis vingt ans, d’une manière sensible,
par le travail des habitants, qui ont enlevé les terres superflues dans
certaines prairies, pour les reporter sur les mauvaises terres et les rendre
fertiles. L’assolement des terres est aujourd’hui triennal ; elles se labourent
facilement avec une charrue attelée de quatre à cinq chevaux. La partie
d’assolement destinée aux jachères est aujourd’hui presque entièrement
ensemencée en pommes de terre, trèfle, luzerne, pois, vesces, gravières,
betteraves, navets et carottes. On récolte aussi des graines oléagineuses,
telles que chènevis, navette, cameline et colza.
Les propriétés, dont la division est trop grande , ne sont généralement
entourées ni de murs, ni de haies, ni de fossés, ni d’arbres ; elles sont
libres et très rarement bornées : les jardins potagers et vergers, près des
habitations, sont seuls entourés de haies vives ou mortes, de palissades ou de
murs : on remarque cependant quelques près assez étendus, qui sont entourés par
des plantations de peupliers.
Le prix de labourage d’un hectare de terre, en quatre et cinq cultures,
pour le blé, est de 60 ou 75 francs ; en trois ou quatre, pour l’orge, de 45 ou
60 francs ; en une seule, pour l’avoine, de 30 francs. L’engrais ordinaire,
employé pour les terres, est le fumier provenant des pailles récoltées sur ces
mêmes terrains, des chevaux, des vaches, des moutons et des porcs que l’on
nourrit, et dont le nombre augmente sensiblement tous les jours.
Les fermes ou gagnages sont généralement louées en nature, verbalement
ou par baux, sous seing-privés, non enregistrés, pour trois, six ou neuf années
consécutives, la contribution restant à la charge du propriétaire, et moyennant
une redevance annuelle, ou canon, de 30 paires de double-décalitres, blé et
avoine, par hectare de terre en roie, en y joignant un quart de près : le
fermier est, en outre, tenu de conduire cette redevance et de la déposer sur les
greniers du propriétaire, au terme de la Saint-Martin (11 novembre de chaque
année).
Il n’existe, sur le territoire de Villers-aux-Vents, aucun bois,
taillis et futaie. Au moment du cadastre, on comptait 83 ares de bois plantés en
saules, aulnes, bouleaux et autres essences ; mais, depuis cette époque, de
nouvelles plantations ont été faites sur une surface de 15 hectares environ,
dans les plus mauvais terrains, et surtout dans ceux qui avoisinent les bois de
Louppy-le-Grand. Ces plantations ont très bien réussi.
Les vignes, situées sur les revers de coteaux, aux expositions du sud et de
l’ouest, sur des terrains argileux, sont plantées en espèce dite vert-plant et
produisent du vin de médiocre qualité. La récolte, année moyenne, est de 81
hectolitres de vin par hectare, ou en totalité de 3.300 hectolitres. Une partie
de cette récolte est consommée dans la localité, et le surplus est vendu aux
communes environnantes, et dans le département de la Marne, au prix de 25
francs la pièce ou 180 litres. Le marc provenant de la récolte est distillé
dans la commune, d’abord pour l’usage des habitants, et l’excédent est livré au
commerce, sur le pied de 50 fr. l’hectolitre.
Les meilleurs prairies sont celles du Pore, du Breuil, de Nalivat et
Au-delà-de-l’Eau. Ces prairies sont en majeure partie arrosées par le ruisseau
de Nausonce, mais seulement lors des débordements. Les autres près, situés dans
diverses autres vallées du territoire, ne sont susceptibles d’aucune
irrigation. Toutes ces prairies peuvent produire l’une dans l’autre, année
moyenne, 4.500 kilogrammes de foin de bonne qualité, par hectare. Un tiers des
prairies est annuellement réservé pour avoir du regain, mais ce produit est
d’un faible rapport : on est pas dans l’usage de fumer les prairies de
Villers-aux-Vents. La quantité de foin récoltée étant, par suite de l’abondance
des prairies artificielles plus que suffisante à la consommation locale, on
exporte annuellement près de 150.000 kilogrammes de foin à Bar-le-Duc et à Châlons.
Les jardins potagers, en contenance suffisante, sont exclusivement
réservés à la culture des légumes pour l’usage quotidien des habitants.
Les vergers, d’une contenance assez étendue, sont plantés en poiriers,
pommiers, cerisiers, quelques noyers, mais particulièrement en pruniers ; les
fruits sont de qualité ordinaire ; les habitants ne donnent pas encore assez de
soin à la propagation des bonnes espèces. Cette récolte dépassant les besoins
de la consommation, l’excédant est vendu à Bar. Les quetschiers, vulgairement
quachiers, sont cultivés ici avec avantage : ces arbres donnent une grande
quantité de prunes, que l’on vend aussi à Bar et avec lesquels on fait beaucoup
de pruneaux.
Il n’y a aucun pâtis ni friches sur le territoire de Villers-aux-Vents.
Le parcours des bestiaux, dans les prairies et les champs, a toujours lieu,
comme autrefois quand les récoltes sont rentrées.
Le nombre d’habitants est de 431, d’après le recensement de 1846 ; il a
sensiblement augmenté depuis 1773, époque à laquelle il n’était, suivant
Maillet, que de 280 ; le choléra y a cependant enlevé 22 personnes en 1832. Cet
accroissement est attribué à l’amélioration du territoire, au bon état des
chemins, qui facilitent les communications, et surtout à l’état de paix dont on
jouit depuis 30 ans ; cependant cette augmentation aurait été encore plus
sensible, sans l’émigration annuelle des émouleurs qui circulent dans
l’intérieur de la France et à l’étranger, où souvent ils se marient et fixent
leur résidence.
L’industrie des habitants consiste principalement dans la culture des
terres et de la vigne ; cependant un tiers environ de ceux-ci vont exercer
au-dehors, pendant neuf à dix mois de l’année, leur profession d’émouleur,
colporteur de couteaux, rasoirs, ciseaux, etc.., laissant à leurs femmes les
soins de la propriété ; cet usage nuirait beaucoup à l’agriculture, si les
cultivateurs qui se livrent en outre au transport des bois, de la tuile et de
la pierre, n’étaient pas en nombre suffisant pour l’étendue du territoire ; mais
comme ce nombre est assez considérable, la terre se trouve cependant très bien
cultivée.
Il s’exerce encore, à Villers-aux-Vents, d’autres profession
patentables, telles que celles de maître de billard, charpentier, cabaretier,
coquetier, cordonnier, épicier en détail, marchand de fourrage, marchand forain
avec voiture, maréchal-ferrant, meunier, fabricant de sabots, tailleur d’habits
et voiturier.
Ce village, composé de 108 maisons rassemblées, construites en pierre
avec bois et en bois, couvertes en tuiles creuses, possède une église ancienne,
sous l’invocation de St-Louvent ; le chœur, d’architecture gothique, est voûté
en pierres ; le reste de l’église n’a qu’un lambris en planches. Il n’y a pas
de maison de cure et, avant 1845, il n’existait ni maison d’école ni mairie ;
mais la commune vient de faire construire une maison d’école destinée aux deux
sexes, avec logement pour l’instituteur, et une mairie, au premier étage, avec
cabinet pour le dépôt d’archives. Le prix moyen d’une maison est de 4000 francs.
A l’ouest de Villers-aux-Vents et à une distance de 1100 mètres sur la
droite de la route des Romains de Bar à Reims, lieudit à Piroye ou Piroué, est
établi un moulin à eau, à une paire de meules, sur le ruisseau de Nausonce.
Cette usine, incendiée en 1843 et totalement reconstruite en 1844, chôme
rarement plus de deux mois dans l’année.
En juin 1843, une tuilerie s’est montée en bas du village, à gauche du
chemin qui conduit à la route et toute à proximité de terrains qui renferment
de l’argile de très bonne qualité pour la fabrication de la tuile.
Les revenus communaux se composent d’une rente sur l’Etat, de 9 fr. ;
de la location d’un petit pré et de boues, 13 fr. : de la location des fruits
de St-Louvent, ; des centimes communaux, 126 fr, ; et des attributions sur
patentes, 70 fr. ; total 235 francs. Des ressources aussi modiques sont loin de
suffire tant à la création qu’à l’entretien des établissements publics ; il
faut donc, pour la moindre dépense, avoir recours au vote de centimes.
Villers-aux-Vents est annexe de Laimont, duquel il est distant de
quatre kilomètres.
La route départementale de Bar-le-Duc à Reims, dite la route des
Romains, traverse le territoire, au sud, sur un trajet de 1100 mètres ; il
existe pour joindre cette route depuis Villers-aux-Vents, qui n’en est éloigné
que de 1300 mètres, un bon chemin constamment entretenu et servant de chemin
vicinal pour se rendre à Laimont, Revigny, Nettancourt et Brabant.
La distance de Villers-aux-Vents à Bar-le-Duc, chef-lieu d’arrondissement
et de contrôle, est de 16 kilomètres, et de Revigny, chef-lieu de canton et
bureau de poste, de 4 kilomètres ; le service des dépêches est journalier.
Les registres civils commencent en 1699, et sont signés par le curé et
les parties. Ce registre de 1699 porte cette suscription : 5° cahier ; il
parait que les quatre registres antérieurs sont déchirés et en grande partie
perdus.
Les registres fournissant d’ordinaire un certain nombre de documents
essentiels ou tout au moins des indications propres à guider les recherches, il
résulte de l’impossibilité de puiser à cette source à Villers-aux-Vents, que
les détails sur l’historique de ce village font à peu près défaut. Nous ne
pouvons conjecturer à quelle époque environ se rattachait son origine. Seulement
on peut mentionner que dans la contrée de la Maise, à peu de distance du
village, on remarque des vestiges de constructions antiques, de débris de
poteries et de tuiles à rebords. L’ancien chemin qui allait de Bar à Reims, par
Sommeilles, traversait cette contrée.
La Notice de Dom Calmet cite un acte par lequel le duc Charles IV
donna, en 1632, à titre d’usufruit, à François de Savigny, seigneur de Leymont,
Fontenoy, Chardogne, etc.., Petit-Louppy et Villers-aux-Vans, en considération
de ce qu’il avait quitté le service du roi de France pour s’attacher au service
dudit duc.
Il se pratique aujourd’hui encore, à Villers-aux-Vents, un usage
curieux et qui se rattache aux vieilles coutumes et traditions du moyen-âge :
Le 22 octobre de chaque année, jour de la fête de Saint Louvent, patron
de la paroisse, a lieu l’adjudication des fruits communaux provenant du chemin
de la fontaine Saint-Louvent. (Les fruits autour de l’église sont adjugés au
profit de la fabrique.) L’adjudicataire de l’année précédente, que l’on nomme
lancier, muni de sa lance, qui consiste en une ronce garnie de rubans, et d’une
paire de gants à usage d’homme, parcourt le village, le lendemain de la fête,
pour prévenir les habitants de se trouver à l’adjudication de ladite lance, qui
se fait le soir même, au milieu de la rue, et demeure à la personne qui a la
mise, au lever de la première étoile. . L’adjudication avait lieu moyennant une
certaine quantité de cire, qu’autrefois on convertissait en cierges destinés au
luminaire de la chapelle du saint ; mais depuis 1844, cette redevance se paie
en argent, au profit de la commune.
Le lancier est tenu, en outre, de payer un décime par franc sur le prix
de l’adjudication ; ce surplus, espèce de don de joyeux avènement se distribue
en trois parts : l’une pour les conseillers municipaux, l’autre pour les hommes
mariés, et la troisième pour les garçons. La soirée se termine par un bal que
donne gratis aux jeunes gens de la commune le nouvel adjudicataire ; si ce
dernier est garçon, il se choisit une lancière, qualité qui revient à sa femme
si il est marié. Il faut ajouter que cette fête se célèbre de temps immémorial.